PROKOP au Chaland qui passe, Binic le dimanche 24 Novembre 2024
Reports
PROKOP au Chaland qui passe, Binic le dimanche 24 Novembre 2024
Quoi de mieux qu'un peu de Rock and Folk en bord de mer pour finir le WE? Et justement, PROKOP vient présenter son dernier album 'Folksinger! (a Gin&Tonic Story)' signé avec the click'n'collectors.
Folksinger? Pas que, on va l'entendre; étonnant d'ailleurs puisque son récent album reste probablement le plus varié et le moins folk de sa discographie... Jamais à cours d'inspiration, le gars n'a pas eu peur de sortir un triple juste avant et pas sur un coup de dés ni de tête.
D'origine tchèque et passé par Lyon (il y fait référence dans une chanson), on le situe, à présent, du côté de Strasbourg, mais il a aussi passé beaucoup de temps en Angleterre, à Hull.
J'arrive, poussé par le vent, et pourtant à la bourre, au troquet le plus Rock n' roll du m² et le maitre des lieux Arnaud le confirme, notamment, par ses rouflaquettes stylées.
Néanmoins, la veille, Cots s'inscrivait bien peu dans le genre... la porte, toujours ouverte pour qu'on puisse bien entendre de la terrasse, restant aussi ouverte à l'éclectisme. ça tombe bien, on préfère ce mot à l'intolérance kleptomaniaque.
Je dois même avouer être court (pas d'esprit j'espère) question timing, manquant la fin du concert à regret. Oui, regret quand la musique est bonne (... vous connaissez la suite...). Par chance, les musiciens commencent juste lorsque je pousse la porte déjà ouverte (cf plus haut) et que je traverse donc. Plus tard, on la ferme mais en compensation, les 2 fenêtres coulissent largement, aspirant les respirations musicales dans un grand courant d'air vers l'extérieur.
4 click'n'collectors accompagnent le principal protagoniste, au béret plus près du style commando (défenseur des bonnes causes) que du basque :
- John Eastwolf à la guitare volubile au son survitaminé, à notre gauche,
- Eustace Leblanc, métronome à la batterie,
- Mozi Ozi, le black panthère flegmatique à la basse, adossé à l'escalier,
- la Santiag Bob au violoncelle et béret concordant, complètement à droite.
'Jenny' à l'ouverture (ce n'est pas du rugby) avec une guitare lead hurlante, pendant que la rythmique de Prokop lancine, allume un feu presque vaudou. Sur un rythme chaloupé bien mis en avant par la basse, se promène le chant, au ton désolé, rappelant les titres blues de LA woman (Doors). La mélopée répétitive agit comme une spirale hypnotique.
La gratte riffe ensuite élégamment et entame un blues rock bien balancé, il s'agit de 'Down in the Drain', dopé par une voix énervée. Le clavier est porté pâle aujourd'hui mais la lead guitare s'en donne à cœur joie.
'The Ballad of an Everlasting Love' trottine sur une guitare agile aux cordes grattées et plaquées. La complicité entre Prokop et John s'établit en regards et sourires puis en défi, se suivant sur leurs cordes. Le tempo, régulier, insiste et ne libère la lead que pour un solo vaporeux d'abord puis ébouriffé en passant en trémolos à écho prolongé. Il faut, de plus, reconnaitre que le violoncelle surprend dans cette ambiance, que je qualifierai de Springsteenienne (mais Bruce, lui, encourageait Clarence au saxophone...).
Le laïus pour introduire 'Beirut in the Air (A City Levitating)' s'avère touchant : un morceau de 2023, en hommage aux victimes de l’explosion du port de Beyrouth, Aout 2020 (la sœur de Prokop a vécu au Liban). Une ambiance lourde s'installe dans une brume jazzy (qui invite une trompette en studio). Sortez les violons, le violoncelle fera l'affaire... La basse approfondit une tristesse qu'il reste difficile de ne pas partager.
'Candy box' (extrait de 'Love Letters From Across The Street' de 2022) se parfume au mambo dans une ambiance jazzy d'avant-guerre. Le rythme swingue en trémoussements élastiques pareils aux doigts sur la basse. Le plus souvent, John, particulièrement motivé, se tort et grimace en tiraillant ses cordes de guitare.
Prokop n'hésite pas à prendre le temps d'expliquer le thème de ses morceaux par exemple 'Thoughts on Edward L. Berneys Communication Techniques (that Made the World a Better Place)' (à vos souhaits aussi!), titre qu'il nous demande de retenir!
Merde! Moi qui n'arrive plus à me souvenir d'un prénom de moins de 4 lettres! L. Berneys, un gars capable de te faire avaler n'importe quelle couleuvre, a déjà persuadé que le meilleur petit déjeuner reste les œufs au bacon ou que la cigarette n'est pas nocive pour les femmes enceintes. Un vrai 'Trump' le monde, roi de la propagande et de la manipulation!
Le morceau, désabusé, déroule folkement et longuement d'une voix trainante et les choeurs, sur un pont en suspension, s'élèvent divinement.
'(The Ballad of) Buddy Kid' nous entraine dans un boogie pas si loin d'un rockabilly fifties. Enjoué, le morceau sautille sur une cadence vive, les baguettes parfois attirées par le cercle. Le chant de Prokop se veut particulièrement dylanien.
'Night Trumpets Dancing Dreams' marque fortement le contretemps et y'a de la rumba dans l'air, au déhanchement prononcé. Aucune trompette ici mais une guitare, saisissante, s'emporte sur un solo.
Pourquoi le sous-titre de l'album 'A Gin&Tonic Story'? Constat : les disques ne se vendent plus. Idée : en liquide, ce sera peut-être plus facile. Vous pouvez donc acquérir la bouteille avec le code à scanner pour écouter la musique à degré équivalent. Bon, avec modération évidemment! Prokop préfère d'ailleurs présenter la chose comme un accompagnement ponctuel de moments d'amitié, conscient des risques d'addiction.
2è extrait de 'Love Letters From Across The Street', 'Some of these nights' s'inspire de balades irlandaises. Des souvenirs viennent à l'esprit, le Waterboys' 'Fisherman's blues' (d'ailleurs la pochette du triple album de Prokop ne dessine-t-elle pas un poisson?) ou Martin Stephenson and the daintees.
Le dépouillé 'The Luckiest Sailor' (Mick McGarry cover) continue dans la même veine. C'est à ce moment que je prends la fille de l'air alors qu'il entre dans la pièce et que l'heure est au recueillement.
Suivent un mashup 'She Died of Love/Under the Bridge' venant toujours du folkeux 'Love Letters From Across The Street' puis un rappel sous forme de boogie 'Black Coffee & Whiskey'.
La musique de Prokop, inspirée, regorge de diversité. Folk d'origine, elle se teinte de blues, rock, jazz, swing ou boogie et même de quelques influences sud américaines.
Les idées de Prokop, engagées, le rapprocheraient d'un Dylan des temps modernes. Une sorte de troubadour voyageur, sensible et réfléchi.
1. Jenny
2. Down in the Drain
3. The Ballad of an Everlasting Love
4. Beirut in the Air (a City Levitating)
5. Candy Box
6. Thoughts on Edward L. Bernays' Communication Techniques (that made the world a better place)
7. (The Ballad of) Buddy Kid
8. Night Trumpets Dancing Dreams
9. Some of these Nights
10. The Luckiest Sailor
11. She Died of Love/Under the Bridge (mashup)
BIS : Black Coffee & Whiskey